Ses cheveux négligemment empourprés narguaient en silence
le vague parfum de princesse russe qui refusait obstinément
l'accolade des tsars usés. Ses doigts, emmêlés dans le soleil,
se fondaient lascivement en un cristal figé, absent de tout
finalisme temporel.
Sur son passage, on léchait volontiers les trottoirs.
Ses chevilles naissaient d'imageries latentes, laissant le peuple
incertain s'abreuver des non-pendules sournois qui
détournesolaient le monde soviétique à coups de poupée.
La Scandinavie entière dansait sur ses paupières endormies.
Même les luths atrophiés n'auraient su arquer les fins
do de sa gamme de sentiments. En général, elle parlait peu.
Ses sonates suffisaient à rendre l'incontrôlable splendeur
des effets désarticulés qui jonchaient l'envers des Taïgas
inutilisable.
Elle jumelait mystérieusement la candeur et la prétention
des Sibéries enneigées. Parfois, lorsqu'elle fond en meringues
bohèmes, ses sens se déficellent en oscillant curieusement
de gauche à Marx. Mais à l'époque, elle penchait plutôt sur
les toits cybernétiques, hallucinant des sombres cavaliers
croulant sous la piètre évanescence des septentrions.
Oh bien sûr, elle connaissait tous les trucs de rideau, mais,
une aube, le rideau de fer tomba sur les arpents de glace
et personne ne vint le relever. Inès sourit
© 1992
Jocelyn Gagnon, Julie Marchiori et Catherine Cyr